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JOP de Paris 2024 : Coup de chaud sur le sport

JOP de Paris 2024 : Coup de chaud sur le sport

Le sport, c’est bon pour la santé ! Et avec les beaux jours, nous avons envie de nous adonner à plus d’activités physiques. Encore faut-il les pratiquer dans les bonnes conditions. Le climat estival, avec notamment la chaleur, l’humidité et la qualité de l’air, peut en effet affecter les performances des sportifs, voire leur santé.

Un article à retrouver dans le magazine de l’Inserm n°61

Le sport est à l’honneur cet été à Paris avec la tenue des Jeux olympiques et paralympiques. Mais, en fonction de la météo, il pourrait faire chaud, très chaud lors de cette 33e olympiade. À cause du changement climatique, il n’est pas rare de nos jours de mesurer des températures supérieures à 38 °C fin juillet et début août dans la capitale française. Le 25 juillet 2019, la station météorologique de Paris Montsouris a même relevé une température de 42,6 °C. De quoi largement altérer les performances des athlètes. « À part pour certaines épreuves courtes et explosives comme le sprint ou le saut en longueur, qui peuvent tirer un bénéfice de conditions chaudes, la chaleur améliorant notamment la conduction nerveuse et donc la contractilité des muscles, le stress thermique a globalement une influence négative sur les performances sportives, en particulier pour les épreuves d’endurance, confirme Franck Brocherie, chercheur en physiologie de l’exercice à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep) à Paris. La chaleur affecte tout particulièrement la thermorégulation de notre organisme, c’est-à-dire notre capacité à réguler notre température centrale. »

Lutter contre la chaleur…

Lors d’activités physiques, notre température interne augmente car nos muscles produisent de la chaleur. « Environ 75 % de l’énergie consommée pour produire un effort physique est transformée en chaleur », précise Nicolas Bouscaren, médecin de santé publique et du sport au CHU de La Réunion, doctorant à l’Université Jean-Monnet de Saint-Étienne et épidémiologiste Inserm. Le principal mécanisme pour évacuer cette chaleur est la transpiration. « Ce processus implique une redistribution du débit sanguin au niveau cutané pour transférer la chaleur produite par nos muscles vers la peau où de la sueur est secrétée par les glandes sudoripares. Et c’est l’eau contenue dans la sueur, qui, en s’évaporant, va faire baisser la température corporelle. » Outre la déshydratation, tout un continuum de symptômes peut alors apparaître en conditions chaudes : des crampes, des malaises, un épuisement voire un coup de chaleur à l’exercice. « Cette hyperthermie intervient quand le corps n’est plus capable d’évacuer la chaleur. Il monte alors en température jusqu’à dépasser les 40 °C », explique Nicolas Bouscaren. Des protéines dites de « choc thermique » sont alors produites en excès : elles provoquent une inflammation systémique et une défaillance multiviscérale incluant notamment des insuffisances rénale et hépatique et des atteintes du système nerveux central. « C’est une urgence médicale qui peut conduire au décès si elle n’est pas prise en charge rapidement », rappelle le médecin.

Pour limiter cette montée en température lors d’épreuves sportives, les athlètes professionnels appliquent plusieurs stratégies dont la plus efficace est l’acclimatation à la chaleur. « Les sportifs vont s’exposer aux conditions environnementales qu’ils devront affronter pendant une à deux semaines au minimum avant la compétition, soit en se rendant sur place en amont, soit en s’entraînant dans des “chambres environnementales” qui permettent de reproduire ces conditions de chaleur et/ou d’humidité, précise Franck Brocherie. Cette acclimatation leur permet non seulement de renforcer leur sudation tout en limitant les pertes de sels minéraux par la sueur, mais aussi d’augmenter le volume plasmatique du sang, ce qui facilite le transfert de chaleur des muscles vers la peau. »

Ces athlètes emploient aussi des stratégies de refroidissement pour faire baisser leur température interne, d’une part juste avant la compétition avec, par exemple, le port de gilets réfrigérants, et d’autre part pendant l’épreuve grâce à des boissons fraîches, souvent enrichies en sels minéraux, voire via l’ingestion de glaces pilées de type granité. Mais les sportifs amateurs n’ont pas accès à cette logistique et certains ne sont même pas conscients des risques pour leur santé.


… et la pollution !

Outre la chaleur, le climat estival cache une autre menace pour les performances sportives : l’ozone ou O3. « Ce gaz est un oxydant puissant qui se forme en cas d’ensoleillement important et de températures élevées à partir des oxydes d’azote et des hydrocarbures émis notamment par le trafic routier », explique Gilles Forêt, physicochimiste de l’atmosphère et enseignant-chercheur à l’Université Paris-Est Créteil. « En cas de fortes concentrations, l’ozone occasionne une inflammation des bronches qui peut entraîner une chute du débit pulmonaire et des symptômes respiratoires susceptibles d’altérer les performances des sportifs d’endurance, voire d’obliger certains d’entre eux à arrêter leurs efforts », ajoute Valérie Bougault, enseignante-chercheuse à l’Université Côte d’Azur et spécialiste de la physiologie du sport. Pour autant, il est encore difficile de démêler l’impact de la chaleur et de l’ozone sur les prestations des sportifs car ces deux facteurs évoluent de concert avec la température. « Nous manquons de données pour estimer l’influence de l’ozone, mais aussi de la qualité de l’air en général, sur les performances sportives », regrette l’ancienne nageuse de niveau national.

Bien que généralement en bonne santé, les sportifs respirent pourtant des volumes d’air importants lors de leurs efforts physiques et inhalent donc plus de polluants que la population générale. C’est pour mieux comprendre l’effet de la pollution de l’air sur la santé respiratoire des sportifs que Gilles Forêt a orchestré le projet Pollusport. Cette étude, qui devrait commencer à la rentrée prochaine, se déroulera à l’Insep avec la collaboration de Franck Brocherie mais aussi d’autres chercheurs dont Valérie Bougault et l’équipe Inserm de Rachel Nadif du Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations de Villejuif. « Nous espérons recruter jusqu’à 400 athlètes de haut niveau pratiquant différents sports – l’athlétisme, le judo, le basket ou encore le tir – dans des environnements extérieurs et intérieurs », précise Valérie Bougault. La qualité de l’air peut en effet être néfaste à l’intérieur des gymnases et des salles d’entraînement où se confinent les polluants en cas de mauvaise ventilation. Pour mener à bien ce projet, les scientifiques étudieront les effets de l’exposition à plusieurs polluants – ozone, particules fines, dioxyde d’azote – et aux pollens sur les performances des athlètes et leur santé respiratoire. « Ces données seront alors comparées aux marqueurs de l’inflammation respiratoire déterminés chez ces athlètes à partir de prélèvements sanguins et de condensats d’air expiré obtenus en respirant au travers un tube réfrigéré », poursuit Gilles Forêt. Les premiers résultats sont attendus en 2026. Ce qui ne doit pas empêcher les organisateurs des JOP de Paris de surveiller les niveaux d’ozone, ainsi que le thermomètre, pour que les épreuves se déroulent au mieux pour les sportifs, et les spectateurs.

À retrouver sur https://www.inserm.fr/actualite/jop-de-paris-2024-coup-de-chaud-sur-le-sport/

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Auteur: Hugh Jackson

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